puisque tout a bien marché jusqu'ici ! Si Gallimard m'avait consenti l'avance que je lui ai demandée, je serais maintenant en train d'écrire ce roman pour bientôt le lui remettre. Mais il me contraint de ce fait à travailler pour les éditions de Minuit à cette collection des réussites françaises. Je suis en train d'écrire de courtes biographies de Georges Carpentier, Jean Taris, Marcel Cerdan, Suzanne Lenglen etc. Ensuite un livre sur les images d'Épinal. Ensuite, une histoire de la bicyclette. Ensuite, le roman ? Je n'arrive pas à faire plus d'une chose à la fois. Et pourtant, mon seul but est de l'écrire. L'ennui est peut-être juste d'avoir un trop grand éditeur, mais où je peux trop tard [sic]. Quand se découvrent les impossibilités, aveugle que l'on était par une sorte de confiance admirative et tellement naïve, et que l'on voudrait bien garder, on ne sait pourquoi. De toutes façons, on est pris au piège.
Pardon de cette lettre décousue. Je suis tellement déçu d'avoir à toujours débrouiller taut de fils pour ne jamais avoir finalement le temps d'écrire la moindre page que je puisse aimer. Ô je sais bien que j'y arriverai quand même mais alors, que de temps perdu et de projets abandonnés.
Je serais heureux de vous voir très bientôt. Il faudrait aussi que je vous parle de la radio : une nouvelle émission sur des faits divers. Et j'espère qu'un jour, vous voudrez bien venir jusqu'ici. Je vous dis toute mon amitié.
M. Bisiaux