L'illusion du naturel
Paris, 20 Février 1929
29. r. des Favorites.
Voici ce que je voulais dire. (Je viens de relire ton Carnet
J. P., « Carnet du Spectateur » (III), La Nouvelle Revue Française, février 1929, p. 242-251. (La publication se poursuivra en mars et juin.) Voir la bibliographie détaillée de B. Baillaud sur le site de la SLJP, et Jean Paulhan, Paul Valéry ou la littérature considérée comme un faux, préface A. Berne-Joffroy, Bruxelles, Complexe, 1987, p. 96. et je ne vois plus les choses aussi clairement qu'après une première lecture, mais enfin voici).
L'illusion de l'exercice devait être dénoncée. Oui, là où les mots paraissent au lecteur les plus déconcertants, les plus particuliers, ils sont le plus souvent pour l'auteur les « choses » même, sa pensée même (« Des mots, dit Gœthe, tu ne vois pas qu'il n'en reste plus un seul. »)
C'est ce que j'ai un jour exprimé dans cette maxime : « Tout le malentendu en littérature vient de ce qu'une phrase est pour l'auteur un point d'arrivée, un point de départ pour le lecteur. » (Arrivée à la « chose » pour l'auteur, départ en mots pour le lecteur.)
Si je tente à présent d'étendre appliquer cette loi de l'expression à l'étude critique d'un auteur, je trouve ceci : la critique doit consister à découvrir la « chose » sous les mots particuliers. S'il découvre la « chose », il le critique doit-il